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Lyon La Duchère, 120 hectares de grands ensembles composés à 80 % de logements sociaux. © Studio Fly

Développement durable, Etat d'avancement du NPNRU

La rénovation urbaine : un levier pour la transition écologique

L’excellence écologique n’est pas réservée aux populations privilégiées. Son impact positif sur la santé, sur les dépenses énergétiques
des habitants, et même sur l’emploi, la place au contraire au cœur des préoccupations des acteurs de la rénovation urbaine.

Vu dans en villes, le mag de l'anru

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Dans l’esprit du public, rénovation urbaine ne rime pas systématiquement avec transition écologique. Pourtant, chacun des projets de renouvellement urbain apporte sa pierre à l’édifice de la protection de l’environnement et du climat. Notre action est vertueuse par définition, puisque nous reconstruisons la ville sur la ville, nous maîtrisons l’étalement urbain et l’artificialisation des sols, nous densifions l’espace, tout en améliorant le cadre de vie, explique Kim Chiusano, responsable du pôle Innovation et ville durable au sein de l’ANRU. Les populations des quartiers identifiés comme prioritaires sont au cœur d’un paradoxe.

L’empreinte carbone des 10 % de Français les plus pauvres est entre 3 et 4 fois inférieure à la moyenne nationale, mais ce sont eux qui subissent le plus durement les conséquences du réchauffement climatique et de l’expansion de l’activité humaine. Pour un habitant disposant de peu de moyens individuels pour s’adapter, vivre à proximité d’axes routiers importants,
dans un logement ancien trop énergivore ou sujet aux variations thermiques extérieures peut s’avérer insolubles.

L'ampleur des financements mobilisés dans le cadre
du NPNRU va permettre de répondre à ces défis

Si la répartition des responsabilités et des impacts est profondément déséquilibrée, les projets de renouvellement urbain accompagnés par l’ANRU représentent une opportunité majeure pour ces quartiers, non seulement de se transformer en profondeur mais aussi d’améliorer leur résilience face au réchauffement climatique, à la raréfaction des ressources ou de la biodiversité. L’ampleur des financements mobilisés dans le cadre du Nouveau
programme national de renouvellement urbain (NPNRU) – 10 milliards d’euros de concours
financiers de l’ANRU générant 40 milliards d’euros d’investissement tous financeurs confondus – va permettre de répondre à ces défis.

Les projets de renouvellement urbain prévoient, dans l’optique de répondre conjointement à l’urgence sociale et écologique, des centaines de milliers de rénovations lourdes de logements, de constructions neuves performantes, d’aménagements d’espaces publics de qualité… Des quartiers durables plus sobres, plus inclusifs, pensés en amont pour mieux répondre aux problématiques d’îlots de chaleur, d’eaux pluviales ou de désenclavement. La preuve par l’exemple…

 

Choisy-le-Roi et Orly : des ressources bien employées

Dans le Val-de-Marne, à Choisy-le-Roi et à Orly, l’accent a plus particulièrement été mis sur les économies d’énergie et la protection des ressources naturelles,
systématiquement évaluées pour chaque ouvrage, sur l’ensemble du cycle de vie des matériaux et équipements, transport, construction, usage et recyclage compris. L’idée n’est pas d’innover pour innover mais d’aller vers l’excellence. Quel est le vrai bilan carbone d’un panneau photovoltaïque venu de Chine, par exemple ? La question mérite d’être posée, souligne Stéphane Touboul, chef de projet au sein de l’ETP Grand Orly Seine Bièvre.

Le bailleur Valophis approuve : Près des deux tiers de l’impact carbone proviennent de la construction, estime Jean-Philippe Boachon, son directeur de projet Développement durable et Innovation. À Orly, les nouveaux équipements publics devraient obtenir le label E+C- (« énergie positive & réduction carbone »), les matériaux biosourcés seront favorisés et les parkings en surface, réversibles, seront préférés aux parkings en ouvrage. Nous recherchons les doubles effets vertueux : moins carbonés, plus respectueux des ressources, commente Amandine Riault, chargée de mission Renouvellement urbain pour la commune. Sur ce territoire, on prévoit le réemploi des matériaux de démolition, via la coopération entre maîtres d’ouvrage notamment. Aujourd’hui, le cadre réglementaire est contraignant mais il tend à évoluer vers des démarches de métabolisme urbain plus importantes, indique Jean-Philippe Boachon.

Cette démarche d’économie circulaire est d’autant plus importante
et structurante pour les territoires qu’elle est créatrice d’emplois non délocalisables. L’ampleur des chantiers prévus partout en France est à ce titre une opportunité unique pour accompagner le développement d’un savoir-faire et la structuration d’une filière opérationnelle pour couvrir à l’avenir des besoins
au-delà des projets de renouvellement urbain.

À Lyon, une progression durable

Soutenues par l’ANRU, certaines collectivités se sont emparées du sujet avec de grandes ambitions. C’est le cas du Grand Lyon, à La Duchère : 120 hectares de grands ensembles des années 1960, composés à 80 % de logements sociaux et objets d’une profonde restructuration depuis 2005. D’abord centrée sur la diversification du tissu local, en termes de fonctions comme d’habitat, la métropole a progressivement évolué vers un urbanisme durable : renforcement de la sobriété énergétique des bâtiments, démarche HQE, chauffage urbain, récupérateurs d’eau pluviale, éclairage naturel des parties communes…

L’amélioration de la performance énergétique d’un bâtiment est en effet un levier décisif pour réduire les charges des habitants. Il n’est pas rare de voir la facture énergétique divisée par 3 ou 4 dans des logements dont l’isolation initiale et le mode de chauffage dataient d’il y a près de cinquante ans.

Aujourd’hui, dans une approche bioclimatique, les immeubles sont orientés de manière à bénéficier d’un bon ensoleillement et bénéficient d’un maximum
de végétalisation pour lutter contre les îlots de chaleur. Les voiries sont réduites et pour 17 % de surfaces construites, le quartier compte 25 % de surfaces végétalisées, jardins privatifs, vergers et autres espaces verts, explique Bruno Couturier, directeur de la Mission Lyon Duchère. La première
partie du programme a d’ailleurs été le premier Éco-Quartier labellisé en 2013.

Mulhouse au fil de l’eau

À Mulhouse, dans les quartiers Wolf Wagner, également labellisé Éco-Quartier, et Vauban-Neppert, le renouvellement urbain s’est dessiné au fil de l’eau. Ou plus exactement au fil de la rivière Doller, qui traverse tous les quartiers prioritaires. Enjeu d’image pour les quartiers, l’accès au cours d’eau et sa protection ont pesé sur les choix d’urbanisme du NPNRU. Cette attention portée à la nature en ville se retrouve dans toutes les municipalités, de plus en plus fortement.

Création de trames vertes ou de serres, prolongation de parc, agriculture urbaine, orientation des immeubles vers les points végétalisés… Chacune agit à sa manière. Toutes favorisent aussi la co-construction entre les élus, les services de la collectivité – habitat, voirie, espaces verts… – , les bailleurs sociaux et les habitants.

La prise en compte de tous les éléments liés à la transition écologique implique de nouveaux modes de travail, plus transverses, dans un but commun. C’est la force du renouvellement urbain, transverse par nature, de pouvoir y répondre, conclut Christine Tiret, cheffe du service Habitat et Renouveau urbain à la Ville de Mulhouse.

Pour aller plus loin

Jean-Benoît Cariou, Chargé de mission Innovation et Transition écologique à l’ANRU

La transition écologique est un objectif incontournable pour l'ANRU !

Nous encourageons la prise en compte d’un maximum d’enjeux de transition écologique et énergétique dans les projets financés par l’ANRU : il s’agit d’un objectif incontournable pour l’Agence, et les collectivités sont guidées en ce sens. Cette ambition se matérialise par des bonus de financement s’appliquant aux opérations dont l’excellence énergétique et environnementale aurait été démontrée. L’Agence soutient également des expérimentations pour valoriser les pratiques exemplaires qui demain, profiteront à l’ensemble des QPV. Le club ANRU+ rassemble les acteurs de la ville durable : lauréats des appels à manifestation d’intérêt “Ville durable et solidaire ” et “ Innover dans les quartiers” lancés par l’ANRU au titre du Programme d’investissements d’avenir, territoires du NPNRU volontaires, quartiers engagés dans la démarche “ Quartiers à énergie positive et à faible impact carbone” de l’ADEME, start-up ou structures de l’ESS... Les projets vont de la mise en place de boucles alimentaires locales à l’autoconsommation d’énergies renouvelables, en passant par la gestion de l’eau et l’adaptation au changement climatique, ou encore l’utilisation de matériaux biosourcés, bas carbone ou de réemploi pour atténuer l’impact des constructions et des aménagements. 

Chantal Pilet, habitante de Lyon La Duchère

Nous avons la chance de vivre dans un immeuble neuf !

Nous avons acheté un appartement à La Duchère en 2016, après avoir eu un coup de coeur pour ce quartier multiculturel très vert. Nous avons la chance de vivre dans un immeuble neuf, ce qui permet d’optimiser notre consommation énergétique. C’est d’ailleurs le cas des habitants d’autres résidences “historiques” de La Duchère, comme Les Érables. En plus, nous disposons d’un très beau parc et de nombreux jardins partagés. C’est une grande préoccupation dans la copropriété. Le plus souvent possible, j’assiste au conseil citoyen pour m’informer sur l’évolution du quartier, via les nouvelles restructurations notamment, mais aussi pour échanger dans le cadre d’ateliers. Nous y abordons toutes sortes de problématiques comme le ramassage des poubelles, d’ailleurs insuffisant pour le tri sélectif. À La Duchère, nous sommes d’excellents trieurs ! Les plus sensibilisés initient les autres.

En chiffres

+ de 800 Éco-Quartiers sont en cours de labellisation. Près de 300 projets sont déjà achevés ou en voie d’achèvement.
 

Le label Éco-quartiers a été créé par l’État, en 2009, en application de la loi Grenelle 2 dans le cadre du plan Ville durable. Utilisation de matériaux renouvelables, optimisation des dépenses en énergie, recours aux fournisseurs locaux, respect de la biodiversité, mobilités douces, mixité sociale, gouvernance multi-acteurs… Encadrés par une charte de 20 engagements et un référentiel très strict, les Éco-Quartiers sont des zones urbaines conçues, ex-nihilo ou dans le cadre d’un renouvellement, et gérées dans une optique de développement durable.

100 M€ d'énergie économisés par an. C'est le gain théorique que permettront les 130 000 réhabilitations et 80 000 démolitions-reconstitutions de logements prévues par le NPNRU.

50 %. C’est le progrès en terme d’économie d’énergie que permet la requalification type d’un bâtiment moyen datant des années 1960.
75 %. C’est le bénéfice énergétique moyen entre un immeuble démoli datant des années 60 et un immeuble nouveau reconstruit.

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